Au terme de sa vie, Jean d’Ormesson, journaliste, écrivain, philosophe, et académicien à la carrière éblouissante, nous a offert une trilogie existentielle débutée par « Comme un chant d’Espérance – en 2014 » suivie par le « Guide des égarés – en 2016 ». Avec « Un Hosanna sans fin » paru en 2018 - 1 an après sa mort - qui fait l' objet de cette chronique, il nous a offert un dernier cadeau à titre posthume et c'est avec beaucoup d'émotion que je l'ai lu.
Dans ce texte assez court, épuré, dépouillé, l'auteur va à l'essentiel : la vie, la mort, la science et Dieu. C'est à la fois sobre et clairvoyant comme on peut l’être à l’aube du crépuscule de sa vie. On y sent irrémédiablement l'homme qui va partir et qui ne voudrait pas le faire sans revenir une dernière fois sur certaines notions – certes maintes fois par lui commentées, débattues… − qui ont fait de sa vie un questionnement.
A travers ce qu'il sait de notre monde, de notre histoire qui l'ont tant épaté et émerveillé, Jean d’Ormesson montre ses questionnements, ses doutes et ses certitudes qui sont forts peu différents des nôtres. Mais il le fait avec esprit et malice comme à son habitude, mêlant gravité et facétie, tout en montrant une certaine résignation ou acceptation de ces réponses que nous n'aurons jamais car notre vie et notre mort restent un mystère pour tous.
Avec ce livre l’auteur nous transmet une leçon d'humilité.
Sa vie, son expérience, ses croyances lui ont apportées certaines réponses qu'il partage avec nous. On peut ne pas être d'accord avec lui mais ce sont ses réponses et c'est très intime : c'est le constat de la vie d'un homme qui cherchait sa vérité, l'a fait avec beaucoup de grâce et nous laisse une œuvre magnifique où nous replonger avec plaisir.
Le premier tiers du livre ne se passe pas sans le mot « mort » à chaque page ; mais à mesure que les pages se tournent, vient se substituer celui d'espérance… Et Dieu dans tout ça ? Les doutes l'envahissent : la vie, la mort nous sont données, nous sont imposées – la vie plus encore - pourquoi vivons-nous ? Où étions-nous avant notre naissance, où serons-nous après notre mort ? Il voudrait croire mais il n'est pas sûr d'y arriver. Et d'ailleurs qu'est-ce-que croire ?
Au fil des pages, l'angoisse jamais ne s'éteint. L'homme peut s'assourdir de la superficialité des petits plaisirs, s'abrutir de remplissage stérile de cerveau, elle reste là qui le ronge. Alors il reste la croyance en Dieu, la croyance plus forte que toute connaissance, la croyance à laquelle il faut s'abandonner pour ne plus souffrir.
Sa fille et éditrice le présente « Un hosanna sans fin » comme le testament de son père. C'est bien le cas. Comme si l'auteur sentait qu'il n'y aurait pas de suite à cette dernière réflexion. Un livre écrit comme un point final, un point d'orgue pour clore une oeuvre littéraire impressionnante. D'ailleurs le destin lui a donné raison puisqu'il s'est éteint pour l'éternité peine quelques semaines plus tard.
Ce texte émouvant, dans son style si particulier, nous permet de clore ce chapitre de la littérature française par un hosanna, un chant, une louange ; et à moi par le truchement de cette modeste chronique de dire à l'auteur que j'ai suivi en littérature dès mon plus jeune age : Adieu l'artiste !
Évoluant dans cette gamme de raffiné et de finesse où il excellait, cet ouvrage est bien le testament spirituel de Jean d'Ormesson !
Belle lecture !
Pascal Francois
Un hosanna sans fin – Jean d’Ormesson – Ed Héloïse d’Ormesson – 11/2018 – 148 pages
(Elles lui ont apporté, le cod est après. ) Votre commentaire est très beau et replace Jean d'O à une niveau humain normal, semblable à nous tous. Bravo.