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Photo du rédacteurPascal Francois

Aussi riche que le Roi - d'Abigail Assor


Ayant une certaine prédilection pour les 1ers romans afin de découvrir de nouveaux talents, je me suis intéressé à Abigail Assor au travers de sa présence parmi les sélectionnés au Prix Goncourt 2021 du 1er roman. Et c’est une belle révélation !


‘’ Le sable dans lequel on est né, on ne peut pas le changer ’’ dit-elle en parlant de son premier roman « Aussi riche que le roi », qui traite des problèmes de la jeunesse et de la société marocaine des années 1990.


Née en 1990, Abigail Assor a vécu au Maroc jusqu’à ses 10 ans. Un Maroc qu’elle n’a que peu connu mais qu'elle décrit à merveille.


Casa la Belle, poumon économique du Maroc là où l’argent est roi. Casa la Blanche, en 1994….


Sarah, jeune française de seize ans, est belle à se damner et fauchée comme les blés. Elle vit avec sa mère dans le quartier populaire de Hay Mohammadi, une mère qui n’a qu’un canapé à lui offrir pour dormir. Française, elle est scolarisée gratuitement au sein du lycée français et fréquente la haute société de Casablanca.


« Tous les garçons la regardaient toujours, même les plus fâchés, même après ses pires mensonges, ils continuaient à la regarder. »


Sa beauté, elle le sait, lui permet d'obtenir des avantages matériels de la part de garçons. Mais elle veut plus. Elle veut tout. Car elle rêve d'une autre vie et quand son petit ami du moment, en apercevant Driss dans un café, lui lâche que « ce mec, c'est le plus riche des plus riches, plus riche que nous tous. Peut-être aussi riche que le roi », elle n'a plus qu'une idée en tête : le séduire et l'épouser.


Mais la vie reste ce qu’elle est dans le Casablanca des années 1990, et quitter « Hay Mohammadi », le bidonville pour vivre à ‘’Anfa supérieur’’, le quartier des villas de luxe est un rêve inaccessible. Dans cette société marocaine régie uniquement par l'argent et dans laquelle les classes sociales ne se mélangent pas, le happy end n’est pas évident.


Driss et Sarah seront-ils un jour libres de choisir, libres d'agir libres de s'aimer ? Et à quel prix... ?


Dans ce roman aux couleurs et aux odeurs du Maroc, on croise aussi Yaya, Alain, Chirine, Badr, Abdellah, Moustache, le viouzabi, ces personnages stéréotypés qui font la richesse du roman autour de Driss et Sarah, tous touchants et aussi inoubliables.


Tous nos sens sont en éveil car Casablanca joue un rôle à part entière. Les descriptions sont immersives et l’on se sent transporté au cœur de ces rues ensoleillées et grouillantes. Les bruits, les odeurs, tous les détails retranscrivent le tumulte de cette ville et ses contrastes, avec son café billard, son sandwich thon tomate et son portefeuille à scratch, que l’on retrouve de pages en pages… On vit, on sent Casa à chaque page !


« Aussi riche que le roi » décrit les relations sociales d’une jeunesse confrontée à la réalité de la hiérarchie des classes dans une société sclérosée patriarcale, sexiste et gouvernée par l'argent. Que ce soit dans les quartiers pauvres ou derrière les façades des maisons luxueuses, la vie et les mœurs sont régies par des traditions patriarcales immuables.

Abigail Assor peint avec son roman le portrait d’une jeune adolescente complexe, qui n'a d'autres choix que d'agir par intérêt dans un pays où la condition féminine est loin d'être reluisante et nous dévoile le portrait d'une jeunesse désabusée et impuissante face au poids des traditions.

L’écriture du livre est à la fois virevoltante, et lancinante. Virevoltante de par les personnages, lancinante de par la répétition des scènes et du discours, empreint d’une certaine gravité. Ce roman est aussi illuminé par Sarah qui nous rappelle l’atemporalité du sujet, celui de la difficile intégration entre classe sociale !


Ce livre m’a passionné tant par son double style ‘’réaliste- carte postale’’, qui est une manière originale d’aborder un thème, que par la profondeur avec laquelle l’auteur le traite.


Bonne Lecture !


Aussi riche que le roi – Abigail Assor – Éditions Gallimard – 01/2021 – 208 pages



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