A première vue, pour certains, Proust peut ne pas sembler une lecture de vacances, et pourtant c’est passionnant quand on a le temps de s’y arrêter. J’ai choisi ce tome parce que nombreux sont celles et ceux qui le connaissent de nom sans jamais l’avoir lu.
Albertine disparue est le sixième tome de A La Recherche du Temps perdu.
En réalité, c’est la version « audiobook » que je veux présenter ici. Si, comme moi, vous n’avez pas la patience de vous asseoir suffisamment longtemps pour lire Albertine disparue (ni d’ailleurs les autres tomes), mais que vous avez toujours rêvé d’avoir une vraie connaissance de cet ouvrage, voici mon conseil pour écouter très facilement Albertine disparue : vous pouvez télécharger l’application Kobo de la fnac sur votre téléphone portable ou votre ordinateur, puis le mettre en bluetooth en voiture, sur des trajets un peu longs (il y a bien 10 à 15 heures d’écoute).
C’est vraiment confortable, parce que ça fait passer le trajet plus vite, et puis on a le plaisir de prendre connaissance de cette œuvre formidable dans les moindres détails. Vous serez au fait de toute l’extraordinaire généalogie des Guermantes, Saint Loup, Forcheville et bien d’autres, de ce que devient Gilberte, la fille de Swann, et les côtés de Guermantes et de Méséglise, Combray, ou Balbec, n’auront plus de secret pour vous.
En réalité, j’ai choisi ce tome car c’est le premier que j’ai vu de Proust dans la liseuse, mais bien sûr vous pouvez commencer dans l’ordre que vous voulez.
Dans ce tome, Marcel Proust revient sur le grand amour du narrateur, Albertine, en montrant combien pourtant la passion tient aux circonstances et aurait pu, toujours, s’attacher aussi bien à un autre objet. En effet, Albertine est grosse, peu jolie, sans charme, mais elle éveille l’obsession du narrateur qui se persuade dès qu’elle s’éloigne qu’il ne peut vivre sans elle, pour s’en dégoûter quand elle paraît revenir. « Laissons les jolies femmes aux hommes sans imagination » écrit Proust. Il parle donc de la passion que représente l’amour, quand l’être aimé échappe à la jalousie de celui qui aime davantage, et décrit les processus psychologiques qui se répètent et qui nous enferment, la nostalgie de celui qu’on a perdu. Pour l’auteur, le cœur de l’être humain ne peut guère changer : « Le plagiat le plus fréquent est le plagiat de nous-même. »
D’autres personnages phares de la recherche ont également disparu dans ce tome, comme la si dynamique grand mère du narrateur, et le deuil qu’elle peut susciter chez le narrateur et sa mère, qui ne vit désormais les événements qu’en pensant à ce qu’aurait éprouvé l’être cher s’il avait été encore là. Et on a envie de consoler cette dernière de sa perte, puisqu’elle ne lui survivra de toute façon que quelques années.
Finalement, c’est pour moi plus facile d’écouter Proust que de le lire et je passe de bons trajets. J'ai écouté Albertine disparue en septembre, et maintenant j'ai repris le tome 1 (j'en suis à un amour de Swann, je découvre enfin comment il a rencontré Odette, avec la fameuse petite phrase de Vinteuil...) Et que d’émotion d’entendre ou de réentendre des passages que l’on connaît tous. J'aime vraiment Proust et un audiobook ça le met plus en valeur que de le lire je trouve.
De plus les voix des comédiens (tous de la comédie françaises, André Dussolier et Lambert Wilson pour Du côté de chez Swann) sont merveilleuses. Par exemple pour Albertine disparue, la voix de Denis Podalydeès est si convaincante qu’on se persuade dès les premières minutes qu’il s’agit de la voix de Marcel Proust lui-même.
Isabelle Roux
A la recherche du Temps Perdue - Albertine disparue - Marcel Proust - Ed Gallimard
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